C’est une parabole très connue mais qui n’est pas sans nous causer quelques interrogations.
Les destinataires de cette parabole ne sont pas les pécheurs comme on pourrait le croire mais les pharisiens et les scribes :
« Cependant tous les publicains et les pécheurs s’approchaient de lui pour l’entendre.
Et les Pharisiens et les scribes de murmurer : "Cet homme, disaient-ils, fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux !" Il leur dit alors cette parabole ».

Nous voilà donc situés pour composer ce tableau. Il y a un « il », un « eux », et un « nous », celui-ci n’étant pas exprimé mais sous-entendu. C’est comme une plainte et une revendication qu’expriment les antagonistes. Car la loi leur interdit de fréquenter ceux qui sont considérés comme pécheurs. Comment alors peuvent-ils trouver leur place dans la fréquentation de Jésus ?
Jésus va leur indiquer sa position ; à eux de la prendre avec lui ou de la refuser au nom de la loi. Dans la parabole, le berger met tout en œuvre pour retrouver sa brebis perdue, au point de laisser dans le désert les quatre-vingt dix neuf autres, comme si une seule brebis était plus importante que le troupeau tout entier.

Ces 99 laissés dans le désert se sentent abandonnés. La brebis perdue se laisse retrouver, heureuse de se reposer sur les épaules du berger. Elle a aussi perdu de sa liberté de vagabonder, de s’aventurer sur des lieux qu’elle avait jugé plus verdoyants sans doute. Et il y a les 99 abandonnés dans le désert ! Leur sort n’est pas enviable. N’est-ce pas ce que ressentent les scribes et les pharisiens qui se croient lésés en voyant l’accueil que Jésus réserve aux publicains et aux pécheurs. Mais il nous faut remarquer que la parabole opère un déplacement : le berger ne retourne pas vers le bercail, mais chez ses voisins et ses amis pour les inviter à se réjouir avec lui.
Alors, les 99 autres n’ont-ils pas aussi à se déplacer et à le suivre ! Et, s’identifiant à leur tour aux amis et voisins, de participer à la joie du berger, joie qui est celle de Dieu même dans les cieux. Comme celle du fils aîné convié à entrer dans la salle du festin.
