
Un soir de concert, le célèbre violoniste Paganini jouait avec tant de fougue qu’une corde se rompit, la plus fine, la chanterelle. Imperturbable, il continua de jouer. Une deuxième corde saute, puis une troisième. C’est presque la fin du morceau. Frénétiquement applaudi, Paganini termine en beauté avec l’unique corde restante, la grosse corde de sol.
A la fin de la vie, une à une les cordes sautent. Jambes faibles, mémoire capricieuse, levers difficiles, fatigue du soir. Combien de temps pourrons-nous encore jouer le concerto de notre vie ? Sans être un Paganini étincelant jusqu’au bout, on peut faire entendre des choses belles avec les cordes qui restent. Il faut les fréquenter en grande amitié plutôt que trop penser aux cordes disparues. Chère vieille corde de sol, la dernière, la plus grave. Corde de la patience courageuse, de la sagesse, de la bonté, des appels à Dieu. Que de notes peuvent jaillir de la dernière corde !

C’est cela qu’on attend autour de nous. Une petite musique de paix et d’humour. Prédication silencieuse, mais si parlante, sur l’espérance. Quand Dante arrive à la description du paradis, il s’exclame : « Il me sembla que tout riait ». La dernière corde est faite pour ce rire.
Texte transmis par Sœur Marie H., SCR